Alimenter l'innovation

Alimenter l’innovation

Entretien avec Etienne Pernot, directeur de la recherche et du développement de l’Efrei, et Elizabeth Colin, conseillère scientifique de Sciences2024 à l’Efrei

L’Efrei (École d’ingénieurs des technologies de l’information et du numérique) est membre de la prestigieuse Conférence des Grandes Écoles, un réseau français de grandes écoles de commerce et d’ingénieurs. Spécialisée dans le numérique, l’Efrei travaille en partenariat étroit avec un large réseau d’entreprises.

Son laboratoire de recherche est impliqué dans le programme Sciences2024, dédié à l’accompagnement des athlètes français dans leur quête de titres aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Elizabeth Colin, Conseillère Scientifique du projet Sciences2024, et Etienne Pernot, Directeur du Laboratoire de Recherche de l’Efrei, nous parlent de Sciences2024. 

Elizabeth, vous êtes la conseillère scientifique de l’Efrei pour Sciences2024. Pouvez-vous nous présenter ce programme ?  

EC : Sciences2024 a été créé il y a six ans pour les Jeux Olympiques et les Jeux Paralympiques. Il s’agit d’un programme de recherche collective, une sorte de speed dating pour les fédérations sportives et les grandes écoles françaises. Les fédérations disent : « J’ai tel ou tel besoin », et nous consultons les laboratoires de recherche pour voir lesquels peuvent répondre à ce besoin ; chaque laboratoire est spécialisé dans un domaine particulier. Il s’agit donc bien de rapprocher la recherche pure et le sport de haut niveau, représenté par les fédérations.   

Quel est votre rôle dans ce programme ?  

EC : En tant que conseiller scientifique de l’Efrei auprès de Sciences2024, mon rôle est de coordonner le programme. Je rencontre chaque semaine les centres de recherche et les fédérations. 

Etienne, pouvez-vous nous dire comment le Laboratoire de Recherche de l’Efrei contribue au programme Sciences2024 ?  

EP : Dans le cadre de Sciences2024, nous sommes spécialisés dans le suivi des athlètes pour savoir précisément où ils se situent, quels sont leurs mouvements ; nous utilisons ensuite ces connaissances pour améliorer les performances. Nous travaillons avec plusieurs fédérations : natation, badminton, patins et équitation. Pour les nageurs, par exemple, nous plaçons un petit capteur dans le bonnet de bain connecté qui nous permet de localiser très précisément les athlètes dans la piscine. En badminton, nous pouvons détecter la position de chaque joueur sur le terrain, dire qui couvre tout le terrain, qui est plutôt un joueur de coup droit, plutôt un joueur de revers, qui a un jeu plus offensif ou défensif. Nous pouvons également voir qui se fatigue rapidement. Nous avons développé un logiciel qui nous permet d’analyser n’importe quelle vidéo et de modéliser les résultats, pour chaque joueur ou pour l’équipe. C’est absolument fascinant.  

Vos étudiants sont-ils enthousiastes à l’idée de participer au programme Sciences2024 ?   

EC : Oui, ils le sont ! Sciences2024 est très attractif pour eux. Il y a une centaine d’étudiants impliqués dans le programme à travers des rencontres, des stages, des doctorats ou des projets de fin d’études. Le sport leur parle, il est exigeant, motivant, et comme en sciences, il faut de la persévérance et de la régularité pour atteindre l’excellence. Il y a donc un parallèle entre le sportif de haut niveau et l’ingénieur de haut niveau. L’implication de nos étudiants dans le monde du sport est très positive d’un point de vue pédagogique. Nous sommes toujours intéressés à avoir de bons sujets pour nos étudiants qui montrent la valeur ajoutée potentielle de l’informatique. De même, nous sommes intéressés par l’exposition de nos étudiants au monde de l’industrie. Cette relation nourrit l’innovation. 

Pouvez-vous décrire votre relation avec ALTEN ? Quels sont les points communs ?  

EP : Nous avons une bonne adéquation culturelle avec ALTEN. Nous avons une organisation complètement différente, mais grâce à une culture similaire, nous nous entendons bien. ALTEN ne nous fournit pas seulement des données et des capacités considérables – nous partageons une passion commune pour l’utilité sociale. Par exemple, nous travaillons ensemble sur la problématique de la santé. Et puis il y a la question de la confiance. Travailler sur des sujets utiles avec passion et confiance, relève d’une grande complémentarité.  

On dit que le sport est un catalyseur d’innovation, comment cela se traduit-il dans votre relation avec ALTEN ?  

EP : Dans la recherche, on cherche toujours à faire sauter un verrou scientifique, il y a toujours une part d’abstraction. Le sport est pour nous un terrain de jeu, nous ne délivrons rien d’opérationnel. C’est là qu’intervient le partenariat avec ALTEN. Chez ALTEN, il y a un dynamisme ambitieux mais pragmatique. Nous créons quelque chose qui fonctionne, mais ensuite il faut un partenaire comme ALTEN pour porter le concept au niveau opérationnel. 

Par exemple, nous travaillons à la fusion d’objets connectés et de vidéos. C’est ce qu’on appelle la fusion multi-capteurs. En utilisant des drones, nous pouvons à la fois localiser un objet et prendre une vidéo de l’homme qui le manipule, puis fusionner les deux canaux d’information. Le suivi et la surveillance seront beaucoup plus précis, plus fiables et plus utiles qu’avec un objet connecté ou une simple vidéo. Les entraîneurs auront une perception plus précise du geste de l’athlète pour l’analyser et l’optimiser. Comme je l’ai dit, pour nous c’est un terrain de jeu – nous nous amusons à résoudre un problème de fusion complexe, à mélanger différents capteurs, des types de données complètement différents, tout en engageant nos étudiants dans une recherche à impact positif. Du point de vue d’ALTEN, il existe un large éventail d’applications potentielles dans l’industrie pour la fusion multi-capteurs. L’utilisation de drones pour étudier les gestes et la localisation des positions peut permettre d’améliorer énormément la production, que ce soit à travers l’ergonomie des postes de travail ou une meilleure fluidité de la chaîne de production. De même, l’impression 3D peut contribuer à réduire considérablement les transports, en permettant la production de pièces et de composants au niveau local. Les avantages potentiels sont considérables en termes de productivité et d’efficacité, ainsi qu’en termes de durabilité. Et ce ne sont là que quelques exemples.